P a r t i e II

Les personnes éminentes de la France

Содержание:

  1. L’HOMME QUI VAINQUIT LA RAGE (1822–1895)
  2. PIERRE LAROUSSE (1817–1875)
  3. PAUL LANGEVIN (1872–1946)
  4. LES FRERES MONTGOLFIER: JOSEPH (1740–1810) ET ETIENNE (1745–1799)
  5. LES GREFFES D’ORGANES
  6. SAINT-EXUPÉRY VU PAR SES CONTEMPORAINS
  7. LA VIE ET L’ŒUVRE DE JULES VERNE
  8. JEANNE D’ARC
  9. EDITH PIAF
  10. VOICI CE QU’ON RACONTE
  11. RENÉ LAENNEC DÉCOUVRE L’AUSCULTATION
  12. JACQUARD

L’HOMME QUI VAINQUIT LA RAGE (1822–1895)

Le nom du grand savant français Louis Pasteur reste dans la mémoire des gens du monde entier, comme celui de l’homme qui vainquit la rage.

Pasteur avait déjà trouvé des vaccins contre plusieurs maladies contagieuses quand il se mit à étudier la rage, cette terrible maladie qui emportait des milliers de vies.

On sait que cette maladie des chiens abandonnés se caractérise par un dégoût de toute nourriture, une horreur de l'eau, un besoin de mordre. Les hommes mordus par un chien enragé présentent, eux aussi les mêmes symptômes.

Telle était cette terrible maladie à laquelle Pasteur avait consacré des années de recherche. C’est en décembre 1880 qu’on amena les premiers chiens enragés au laboratoire de Pasteur pour qu’il puisse observer leur maladie. Le 10 décembre de la même année Pasteur apprit qu’un petit enfant de cinq ans venait de mourir de la rage à l’hôpital Trousseau. Il y courut aussitôt. La salive de l’enfant, inoculée à des lapins, les tua en quelques heures. Donc le microbe de la rage se trouvait dans la salive du malade. C’est contre ce microbe qu’il fallait trouver un moyen de combattre.

De nombreuses expériences sur des lapins, des chiens commencèrent. Les résultats étaient bons.

Le 6 juillet 1885, Pasteur vit entrer dans son cabinet une jeune Alsacienne très émue, conduisant un garçon de neuf ans, Joseph Meister. Il avait été mordu, il y avait deux jours, par un chien enragé en se rendant à l’école. Le docteur du pays, au courant des travaux de Pasteur, avait conseillé à Mme Meister de lui amener son fils le plus vite possible. L’enfant souffrait de quatorze blessures...

L’émotion de Pasteur fut profonde. Avait-il le droit d’essayer pour la première fois sur un enfant un remède dont l’effet n’était pas encore vérifié sur l'homme ? D’un autre côté, pouvait-on laisser mourir ce pauvre enfant sans tenter de le sauver ? <...>

Pasteur consulta ses collègues et, le même soir, inocula le vaccin le plus faible à Joseph Meister. Quelques jours plus tard, il vaccina l’enfant de nouveau. Le petit, d’abord effrayé, s’était calmé et s’amusait au laboratoire avec les animaux enfermés dans les cages. Il dormait et mangeait bien. Le 16 juillet, Pasteur lui inocula un vaccin plus fort, celui qui tuait les lapins en quelques jours; après quoi, le savant passa la nuit la plus terrible de sa vie.

Quelques jours plus tard, Joseph Meister, en parfaite santé, repartit pour l’Alsace.

Le 14 octobre de la même année, dans le Jura, six petits bergers furent attaqués par un chien enragé. Le plus âgé d’entre eux – il n’avait pas quinze ans – Jean Baptiste Jupille, voulut protéger ses camarades : il marcha sur l’animal, qui se jeta sur lui et saisit son bras gauche. Jupille tâcha de se dégager avec la main droite, qui était aussi mordue. Les autres enfants se jetèrent à son secours et l’animal fut assommé. Le maire du village écrivit aussitôt à Pasteur pour le prier de sauver le jeune berger. Mais lorsque Jupille arriva au laboratoire, six jours avaient déjà passé – deux fois plus que pour le petit Meister. Dans ces conditions espérer un bon résultat ? Que d’émotions ! Et quelle joie lors qu’un mois après, on comprit que l’enfant était sauvé !

Après cette deuxième expérience, le président de l’Académie de médecine, au cours d’une séance solennelle, déclara :

– Nous avons le droit de dire que la date d'aujourd’hui est pour toujours mémorable puisqu’elle est celle d’un des plus grands progrès dans la médecine : la découverte d’un remède qui permet de lutter contre une des maladies les plus terribles, la rage.

D’après A. Dielette, Aventures historiques.

PIERRE LAROUSSE (1817–1875)

Pédagogue, encyclopédiste et éditeur français, Pierre Larousse est né à Toucy, en Bourgogne. Fils d’un forgeron, il fut un brillant élève de l'école publique. A 16 ans, il obtient une bourse qui lui permet d’entrer à l’école normale de Versailles. Quatre ans plus tard, il est instituteur à Toucy, mais il rêve d’autres perspectives. A vingt-trois ans, il part pour Paris, où il suit les cours de la Sorbonne, du Collège de France et du Conservatoire des arts et métiers. Déjà à cette époque il publie un petit ouvrage pédagogique « La lexicologie des écoles ».

En 1852, il fonda une librairie d’édition, la Librairie Larousse, qui se développa rapidement.

Ce grammairien et lexicographe célèbre, dont le nom est devenu pour beaucoup synonyme de dictionnaire, mourut à la tâche avant d’avoir pu achever un travail gigantesque : la rédaction du Grand Dictionnaire Universel du XIXe siècle.

« Je ferai un livre, disait-il, où l’on trouvera, à l’ordre alphabétique, toutes les connaissances qui enrichissent aujourd’hui l’esprit humain ».

Le Grand Dictionnaire abordait les sujets les plus divers. On y trouvait des recettes de cuisine, des extraits d’opéra, des textes de chansons populaires, des milliers d’anecdotes. Il faisait une large place aux voyages et aux découvertes des explorateurs qui éveillaient alors l’opinion.

Le succès du Grand Dictionnaire fut extraordinaire dès le départ. Depuis lors, les éditions se succédèrent jusqu'au Grand Larousse encyclopédique en 10 volumes. Sa version simplifiée subit chaque année, depuis 1906, une révision partielle, afin de suivre de très près l’évolution du français contemporain. De temps à autre, il se renouvelle plus profondément. Le Petit Larousse qui était né, lui, en 1856 et qui fut transformé successivement a été suivi du Nouveau Petit Larousse de 1968.

Serviteur de la traditionnelle clarté de la langue française, le Larousse montre qu’il est un organe vivant comme la langue elle-même.

D’après les Grands hommes de France

PAUL LANGEVIN (1872–1946)

Paul Langevin est né le 23 janvier 1872, à Paris, dans la famille d’ouvrier parisien. De son père, il apprit le respect du travail manuel. Sa vie est un exemple pour les générations à venir : ce fils du peuple est devenu un célèbre chercheur et savant grâce à sa volonté, à son travail et à son intelligence.

Après ses études primaires, ses parents l’avaient mis au collège Lavoisier où le jeune homme montra de brillantes aptitudes pour sciences. En 1887, il entra à l’Ecole de Physique et Chimie où Pierre Curie, qui y enseignait à l’époque, exerça une grande influence sur son orientation scientifique. Il en sortit en 1891.

En 1893, Paul Langevin fut reçu premier à l’Ecole Normale supérieur. Après avoir terminé ses études, il poursuivit ses recherches scientifiques en France, puis en Angleterre dans un laboratoire de physique à Cambridge. De retour à Paris, il entra à la Sorbonne, à la chaire de physique.

En 1902, Paul Langevin soutint sa thèse de doctorat qui attira l’attention des célèbres physiciens. En 1905, il succéda à son maître Pierre Curie comme professeur à l’Ecole de Physique et Chimie. En 1925, il en devint le directeur. Ainsi, vingt ans plus tard, il fut à la tête de l’Ecole où sa carrière scientifique avait commencé.

Ce grand savant fit d’importantes découvertes dans le domaine de physique atomique et nucléaire. C’était un grand physicien, un mathématicien, un chimiste, un théoricien et un expérimentateur.

II fut nommé docteur honoris causa de nombreuses universités étrangères, élu membre de très importantes sociétés savantes, y compris l’Académie des sciences de la Russie et ensuite de l’U.R.S.S. Enfin, en 1934, ce grand savant devint membre de l’Académie des sciences de Paris.

Son prestige parmi les hommes de science était très grand en France et à l’étranger. Il était toujours du côté des hommes qui souffraient des injustices sociales. Il disait que le développement de la science est le facteur principal du progrès de la civilisation, à condition qu’on mette les découvertes et les inventions au service de la paix. P. Langevin comprenait très bien que tous les hommes de bonne volonté doivent être unis dans la lutte contre le fascisme. En 1933, il accepta de devenir président du Comité Mondial permanent contre le fascisme et la guerre.

Après la défaite de la France, il fut arrêté et jeté en prison. Le savant qui avait à l’époque 68 ans y souffrit beaucoup. Ce crime des occupants fut un signal pour la résistance universitaire. Le 8 novembre, P. Langevin devait commencer son cours de physique. La Résistance invita tous les étudiants à se rendre au Collège où les occupants avaient fermé la chaire de physique. Les élèves et les amis du savant prirent place sur les bancs. Joliot-Curie s’adressa à l’auditoire. Il parla du crime des autorités allemandes commis contre le grand Français et contre la science et déclara sa décision de fermer son laboratoire jusqu’à la libération de Langevin. Le 11 novembre, les étudiants organisèrent une manifestation sur la place de l’Etoile (aujourd’hui place Charles de Gaulle) et exigèrent sa libération. Les autorités allemandes fermèrent l’Université de Paris. Des répressions s’en suivirent. On envoya P. Langevin dans une petite ville sous la surveillance da la police. En janvier 1942, les occupants l'arrêtèrent encore une fois. Le 2 mai 1944, il s’enfuit en Suisse avec de faux papiers que son élève et ami Joliot-Curie lui avait apportés. Le 22 septembre 1944, Paul Langevin revint dans la France libérée.

En mars 1945, sur l’initiative du Front national universitaire, la France célébra le 73e anniversaire du grand savant. P. Langevin y prit la parole : « Notre confiance en l’avenir de l'effort humain doit inspirer et soutenir notre volonté de défendre contre toute agression le trésor de culture et de civilisation ... et de le laisser à nos enfants en y ajoutant toujours un peu de science, un peu plus de justice et un peu plus d’amour ». Paul Langevin mourut le 19 décembre 1946.

Paul Langevin mourut le 19 décembre 1946.

L’humanité gardera le souvenir de ce célèbre savant, de ce grand humaniste.

D’après Hommage à Paul Langevin

COMMENTAIRES

Collège Lavoisier – établissement d’enseignement secondaire. Les plus célèbres spécialistes y enseignent toutes les disciplines.

Ecole de Physique et Chimie – grande école polytechnique en France où l’on forme des spécialistes dans le domaine de la physique et de la chimie.

Docteur honoris causa – titre honorifique attribué à des personnages de distinction.

LES FRERES MONTGOLFIER: JOSEPH (1740–1810) ET ETIENNE (1745–1799)

Depuis Icare, les hommes ont toujours espéré voler un jour, tels les oiseaux. Toutefois, comme l’homme est né sans ailes, il fallait trouver un appareil qui le porte et le soulève. Pour que cet appareil puisse quitter le sol et monter dans l'espace, il faut qu’il soit plus léger que l’air. C'est notamment ce que pensaient les deux frères Montgolfier dans les années quatre-vingts du dix-huitième siècle.

Ils firent beaucoup d’expériences et un jour ils trouvèrent la solution à ce problème. Le 5 juin 1783, dans un champ, les frères Montgolfier allumèrent un grand feu de paille qui donna une épaisse fumée blanche. Puis ils tinrent au-dessus du feu un grand sac de près de dix mètres. Celui-ci se remplit de fumée et s’éleva dans l’air, dès qu’il fut lâché.

Il s’éleva ainsi à près de deux mille mètres et resta dans l’air plus de 10 minutes avant d’atterrir à trois kilomètres plus loin.

Renouvelant plusieurs fois l’expérience, les chercheurs comprirent bien vite que ce n’était pas un nouveau gaz produit par le feu qui entraînait leur ballon mais que, bien plus simplement, le feu réchauffait une certaine masse d’air qui, devenu chaud, était plus léger que l’air de l’environnement et permettait donc au ballon de voler. Le vol pouvait durer tant que l’air dans le ballon restait chaud. D’où la nécessité d’un feu permanent accroché au ballon.

Ils fabriquèrent un immense ballon, dont l’orifice restait ouvert à la partie inférieure communiquant avec une sorte d’appareil dans lequel on allumait un feu.

C’est cet aérostat qu’ils présentèrent quelques mois plus tard au roi Louis XVI : l’aérostat s’éleva, emportant des animaux dans sa nacelle en présence de toute la cour stupéfaite et enthousiaste.

C’est avec un appareil presque semblable que, le 21 novembre 1783 montèrent à leur tour dans le ciel deux navigateurs, Pilâtre de Rozier et le marquis d’Arlandes. Ils accomplirent sur Paris un vol de 25 minutes et de près de six kilomètres.

Ce vol apporta aux frères Montgolfier la gloire et l’orgueil d’avoir inventé le premier aérostat volant utilisable par l’homme.

Voilà comment se déroula ce vol.

... Bientôt le ballon est prêt pour les premiers essais. Il mesure 20 mètres de hauteur, 16 de diamètre et peut contenir 20,000 mètres cubes d’air chauffé par le feu de paille suspendu à l’aérostat par des chaînes. De part et d’autre de la partie extérieure de l’orifice, on place deux paniers en forme de demi-lune destinés aux navigateurs...

Cependant le roi Louis XVI refuse l’autorisation de faire ce vol en ballon libre. Il permet seulement que l’on embarque dans l’engin deux condamnés à mort. « Quoi ! s’écria Pilâtre de Rozier, un des navigateurs, deux criminels auraient les premiers la gloire de quitter la terre et de survoler Paris ? Non, cela ne sera point ! »

Après plusieurs protestations le roi permet d’accomplir cette expérience qui a lieu le 21 novembre 1783 à Paris.

Ce jour-là, dès midi, les Parisiens ont envahi le parc où, sur une pelouse, est placé l’aérostat.

Les préparatifs sont lents : il faut faire des réparations. Après quoi Pilâtre et le marquis d’Arlandes, le second navigateur, allument un grand feu et y jettent des bottes de paille. Le marquis d’Arlandes raconte dans le Journal de Paris du 29 novembre :

« Je jette des bottes de paille dans le feu. La flamme grandit. L’instant après, je me sens enlevé et je dis à mon compagnon : – Pour cette fois, nous montons.

Il est 1 heure 54 de l’après-midi... L’aérostat vole en effet vers le sud-ouest. En dessous des voyageurs un petit village, ses maisons et ses moulins, des vignes. Un drame se joue à bord de l’aérostat. Le marquis d’Arlandes vient de s’apercevoir qu’il y a des trous dans la nacelle. La toile a pris feu !

– Il faut descendre ! dit le marquis à Pilâtre.

Il réussit vite à éteindre le feu, puis il répète à son compagnon :

– Il faut descendre.

Pilâtre regarde sous lui et répond :

– Nous sommes sur Paris.

– N’importe, lui dis-je.

– Mais, voyons, n’y a-t-il aucun danger pour vous? Etes-vous bien tenu ?

J’examinai de mon côté et je m’aperçus que j’étais en sécurité. Je frappai les cordes principales que je pouvais atteindre, toutes résistèrent. Je dis alors :

– Nous pouvons traverser Paris.

Nous faisons du feu, et nous nous relevons avec la plus grande facilité. En nous relevant, un courant d’air accéléra notre vol et nous porta vers le sud. Je vis, sur ma gauche, une espèce de bois que je crus être le jardin du Luxembourg... »

L’atterrissage a lieu non loin de Paris. Une foule de spectateurs accourt vers les navigateurs et se précipite sur la redingote de Pilâtre de Rozier et se la partage comme souvenir. Le marquis d’Arlandes se hâte de trouver un cheval et galope à Paris où va être établi un procès-verbal de la journée héroïque. On l’accueille avec des applaudissements.

D’après les Grands destins. Les conquérants de la science

LES GREFFES D’ORGANES

Depuis plus de vingt ans, on pratique avec succès des greffes de peau et de tissus osseux. Mais les transplantations d’organes chez l’homme sont toutes récentes. Elles ont été précédées de milliers d’expériences pratiquées sur des animaux.

Dès 1960, la perfection des techniques opératoires et les succès obtenus décidèrent quelques chirurgiens à sauver par ce moyen des vies humaines.

Des greffes d’organes furent pratiquées, avec plus ou moins de succès, dans différents pays. Aujourd’hui, plusieurs centaines de personnes vivent avec un rein étranger.

Partout on attend l’annonce d’une greffe du cœur, l’organe symbole de la vie. La nouvelle extraordinaire arrive d’Afrique du Sud, en décembre 1967. La radio, la télévision, la presse annoncent que le jeune professeur Barnard vient de tenter la première transplantation d’un cœur humain. M. Washkansky, un malade incurable, a reçu le cœur d’une jeune fille tuée dans un accident. Pendant dix-huit jours, l’espoir, le bonheur rayonnent autour de l’opéré et de son chirurgien. Puis c’est la fin : Washkansky meurt d'une pneumonie. Le Dr. Barnard est infiniment triste. Il sait cependant, ainsi que ses confrères, que son opération a fait franchir une étape capitale à l’histoire de la médecine. Aussi dit-il : « Je recommencerai ».

Le 2 janvier 1968, il recommence. C’est encore le succès. L’opéré, Philip Blaiberg a survécu. Il n’est mort que plus d’un an plus tard.

La bataille n’est pas encore gagnée...

D’après M. Picard, De A ... à Z

SAINT-EXUPÉRY VU PAR SES CONTEMPORAINS

Le nom de Saint-Exupéry, écrivain aviateur, est cité parmi les plus grands écrivains de la France de nos jours. Ses œuvres Courrier Sud, Vol de Nuit, Terre des hommes, Pilote de guerre, Le Petit Prince, traduites en plusieurs langues, ont révélé au monde son talent et sa philosophie humaniste. Agir pour unir les hommes, lutter pour leur bonheur, telle est la première pensée de sa philosophie. Antoine de Saint-Exupéry était très aimé de ses camarades qui l’estimaient pour ses qualités humaines. Voilà comment le voyaient ceux qui l'ont connu :

« Antoine de Saint-Exupéry était un grand gaillard à la voix douce, au regard concentré, dont toute la personne indiquait, au premier abord, le rêveur plus que l’homme d’action. »

« Sa seule présence était un aimant qui attirait les individus les plus divers. Quand Saint-Exupéry racontait ses histoires, mécaniciens, savants, fermiers devenaient attentifs, tels des enfants écoutant un beau conte de fées ... Auprès de Saint-Exupéry, les gens se sentaient rassurés. »

« Sa fidélité en amitié, sa bonté, sa probité sont vraiment exemplaires. »

D’après J. Pernard-Lue, 100 grandes figures françaises

LA VIE ET L’ŒUVRE DE JULES VERNE

C’était l’époque des grands progrès de la science et de la technique : en 1839 le premier bateau à vapeur a traversé l’océan Atlantique ; en 1831 Faraday a découvert l’induction électrique. Le temps de Helmholtz, de Berthelot, de Mendeleïev et de Darwin avait commencé. La grande industrie naissait et avec elle les théories des philosophes qui voyaient dans la science le guide de l’humanité.

Jules Verne pensait aussi que la science pouvait tout. Un de ses amis, Nadar, écrivain, journaliste, photographe voulait construire un aérostat et il parlait souvent à Jules Verne de cette invention.

A la même époque le voyageur anglais Livingstone a fait de grandes découvertes en Afrique. Quand il s’est perdu, un autre voyageur anglais, Stanley, est allé à sa recherche. Il a trouvé son compatriote près du lac Tanganyika. Jules Verne s’intéressait beaucoup à cette expédition et il l’a prise pour sujet d’une nouvelle sur la vie des géographes célèbres. Il a inventé un énorme ballon qui portait le nom de Victoria et il a imaginé un vol dans ce ballon au-dessus de l’Afrique. Il savait tout sur la géographie, la botanique et la zoologie du continent africain. Le ballon était de la fantaisie, mais le voyage en Afrique était réel.

Jules Verne a porté sa nouvelle à sept éditeurs, mais ils n’ont pas voulu la lire. Quand Jules Verne a apporté sa nouvelle au septième éditeur, qui s’appelait Hetzel, il l’a trouvé au lit : le vieil homme était malade. Hetzel lui a dit de laisser le manuscrit et de revenir dans quinze jours.

Deux semaines plus tard, Hetzel a dit à Jules Verne :

– Jeune homme, c’est bien, c’est très bien. Mais le tout ne se tient pas encore, il faudra lier ensemble tous les épisodes et faire de cela un roman d’aventures. Je l’achète. Vous avez beaucoup de talent, Monsieur. Je vous ferai un contrat...

Jules Verne a transformé sa nouvelle en roman et le contrat a été signé. Voilà comment est né le roman Cinq semaines en ballon qui a fait de Jules Verne un écrivain célèbre.

Jules Verne a publié ses premières œuvres sur les colonnes d’une revue pour les jeunes. Sur les pages de cette revue ont paru : les Aventures du capitaine Gâteras et le Voyage au centre de la Terre. En 1865 a paru le roman De la Terre à la Lune.

Les enfants aimaient beaucoup les romans de Jules Verne. Mais ses romans intéressaient les grandes personnes aussi. Des physiciens, des astronomes et des mathématiciens de son temps étudiaient les œuvres de Jules Verne, vérifiaient ses calculs.

La série des romans Les Voyages extraordinaires a duré quarante années. C’étaient : Les Enfants du capitaine Grant (1867), Vingt mille lieues sous les mers (1869), Le Tour du monde en quatre-vingts jours (1873), L’Ile mystérieuse (1874), Un Capitaine de quinze ans (1878) et beaucoup d’autres romans.

Dans ses romans Jules Verne parle souvent de la mer. Il l’aimait et il a fait beaucoup de voyages lui-même ; il est allé en Angleterre, en Scandinavie et en Amérique du Nord.

Quand il est devenu riche, il a acheté un yacht sur lequel il aimait naviguer sur les fleuves de la France. Il disait que son bateau était « son cabinet de travail flottant ».

Jules Verne a passé la fin de sa vie à Amiens où il vivait avec sa femme et son fils Michel.

Jules Verne est mort le 24 mars 1905 dans sa maison d’Amiens, auréolé de gloire, célèbre en France et à l’étranger. Il a écrit 104 romans d’aventures et nouvelles et créé le genre littéraire qui s’appelle maintenant « science-fiction ».

Son imagination se base sur les possibilités techniques de son temps. Ses sous-marins, ses obus interplanétaires ne sont pas de pures fictions.

– Tout ce que j’imagine sera réalisé plus tard, disait-il souvent.

Dans les livres de Jules Verne, on découvre tous les pays du monde et toute l’humanité qui conquiert les régions souterraines et sous-marines, l’atmosphère et l’espace cosmique.

Jules Verne est un écrivain optimiste et humain. Son œuvre renferme une grande leçon : la confiance en l’homme. Le rôle de la libération de l’homme est lié chez lui à l’image du savant, de l’inventeur ou de l’ingénieur, à l’image de l’homme qui triomphe de la nature. La réalité a dépassé les rêves de Jules Verne. Mais il reste un écrivain qu’on aime lire et qui doit être lu.

D’après Les récits littéraires

JEANNE D’ARC

Jeanne d’Arc est née en 1412 environ, au village de Domrémy en Lorraine. Jusqu’à l’âge de 17ans elle a vécu dans sa famille où elle faisait paître les brebis de son père.

Mais un jour elle a entendu les voix de Saint Michel, de Sainte Catherine et de Sainte Marguerite qui lui ont ordonné (comme elle a dit elle-même) d’aller délivrer Orléans, assiégé par les Anglais et de faire sacrer à Reims le dauphin Charles.

Depuis 1420, le pays est divisé en deux. Au nord de la Loire règne un roi anglais. Au sud, le fils de Charles IV, le dauphin Charles s’est réfugié à Bourges. Les ennemis l’appellent « le roi de Bourges ». Partout en France il y a des ruines : villages incendiés, paysans massacrés, famines. A Bourges, l’espoir et la volonté ont abandonné le dauphin et la cour.

Chasser les Anglais de la France c’est ce que souhaitent avec Jeanne la plupart des Français…

Il y a 500 km entre Domrémy et Chinon où se trouve le roi. Jeanne d’Arc et son escorte font en onze jours ce chemin. A Chinon, le roi, après quelques hésitations lui confie une petite troupe qui va secourir Orléans.

Jeanne d’Arc se lance courageusement en bataille. Les assiégés reprennent courage. Bientôt Jeanne pénètre dans la ville où les habitants lui font un accueil triomphal.

Il faut convaincre Charles d’entreprendre le voyage à Reims. La victoire d’Orléans le décide. Le 17 juillet 1429 Jeanne d’Arc conduit le dauphin dans la cathédrale de Reims où il est sacré.

Jeanne d’Arc continuait la lutte. Au cours d’un combat elle a été prisonniée. Les Anglais qui la détestaient l’ont jugée comme sorcière. Le procès a duré deux mois. Jeanne tenait tête à ses accusateurs mais, abandonnée de tous, elle a été condamnée à mort.

Le 30 mai 1431 Jeanne d’Arc a été conduite sous la garde de 800 soldats anglais sur la place du Vieux Marché à Rouen pour être brûlée vive. Les Anglais étaient impressionnés par son courage. L’un d’eux s’est écrié : « Nous sommes perdus, nous avons brûlé une sainte ! ».

Les Français ont compris l’exemple que Jeanne d’Arc leur avait donné et dans un sursaut d’énergie ils ont chassé de France les derniers Anglais.

D’après William Reymond Histoire de France

EDITH PIAF

C’était dans le quartier des Champs-Elysées. En ce temps-là, je chantais dans la rue accompagnée de ma sœur qui demandait l’aumône de sa petite main tendue.

Pâle, mal peignée, les jambes nues, flottant dans un vieux manteau troué, trop long et trop vaste pour moi, je chantais une chanson populaire de Jean Lenoir.

Quand j’ai fini, tandis que ma sœur recevait les sous jetés par de rares passants, j’ai vu venir à moi un homme qui avait l’air d’un véritable seigneur. Je ne l’avais pas remarqué quand je chantais. Il n’était pas content, je le voyais bien.

Il s’est arrêté devant moi. C’était un monsieur très élégant.

– Tu n’es pas un peu folle ? m’a-t-il dit sévèrement. Tu vas te casser la voix.

Je n’ai pas répondu. Je savais qu’une voix pouvait « se casser », mais la chose ne m’inquiétait pas, j’avais d’autres soucis.

Il était bien rasé, bien habillé et il avait l’air gentil, mais il ne m’intéressait pas. J’ai haussé les épaules :

– Il faut bien que je mange.

– Bien sûr, mon petit ... Seulement, tu pourrais travailler autrement. Avec la voix que tu as, pourquoi ne chantes-tu pas dans un cabaret ?

Je ne lui ai pas dit que, vêtue comme j’étais, avec ma mauvaise petite jupe et mes souliers trop grands pour moi, je ne pouvais me présenter nulle part ; je lui ai répondu seulement :

– Parce que je n’ai pas de contrat ! Et j’ai ajouté :

– Si vous en avez un à m’offrir ?

Il a eu un petit sourire amusé et m’a dit :

– Bon, on va essayer. Je m’appelle Louis Leplée et je dirige un cabaret. Tu viendras lundi à quatre heures. Tu me chanteras toutes tes chansons et nous verrons ce qu’on peut faire de toi...

Tout en parlant, il avait écrit son nom et son adresse sur un bout de papier. Il me l’a remis avec un billet de cinq francs. Puis il a répété :

– Lundi, quatre heures. N’oublie pas ! et il s’est éloigné.

J’ai caché le bout de papier et le billet dans ma poche et je me suis remise à chanter. L’homme m’avait amusé, mais son histoire, je n’étais pas très sûre d’y croire. Et le soir, lorsque je suis rentrée avec ma sœur dans la petite chambre que nous habitions dans un mauvais hôtel, j’avais décidé que je n’irais pas au rendez-vous ...

Le lundi, ce rendez-vous, je l’avais complètement oublié. Et j’étais encore couchée tard dans l’après-midi, quand je me suis souvenue brusquement de ma conversation avec l’homme de la rue Troyon.

– Tiens, ai-je dit, c’est aujourd’hui que je devais aller voir le monsieur qui m’a demandé pourquoi je ne chantais pas dans un cabaret.

Ma sœur m’a dit :

– A ta place, j’irais. On ne sait jamais. J’ai ri :

– Peut-être ! Mais moi, je n’y vais pas. Je ne crois plus au Père Noël.

Pourtant, une heure plus tard, je m’habillais rapidement, et en courant, j’allais prendre le métro. Je ne savais point moi-même pourquoi j’avais changé d’avis. J’allais à ce rendez-vous sans rien espérer, sûre que je perdais mon temps.

Quand je suis arrivée, il était cinq heures. Leplée m’attendait à la porte.

– Une heure de retard, a-t-il dit. Ça promet ! Qu’est-ce que ce sera quand tu seras célèbre ?!

Cet accueil m’a effrayée. Je me taisais. Je l’ai suivi, pénétrant pour la première fois dans un de ces cabarets de nuit élégants qui, pour la petite fille pauvre que j’étais, représentaient le luxe suprême. Je le contemplais avec admiration.

La salle était vide et sombre, à l’exception d’un angle, dans lequel j’apercevais le piano. Il y avant là un pianiste, déjà installé à l’instrument. Je ne possédais pas de musique, mais cela ne l’a pas empêché de m’accompagner et fort bien. J’ai chanté à Leplée tout mon répertoire qui était d’une étonnante variété.

J’avais mis tout mon cœur dans mes chansons : ce n’était pas pour avoir un contrat, je n’y croyais pas, mais pour faire plaisir à ce monsieur qui voulait bien s’intéresser à moi.

Leplée m’a arrêtée quand j’avais fini avec les chansons et voulais commencer les airs d’opéra.

Il est venu à moi, passant la main sur mon épaule, il m’a dit doucement :

– C’est très bien, mon petit, et tu auras du succès, j’en suis sûr. Seulement, ton répertoire, ce n’est pas ça... Il te faut des chansons allant avec ton caractère, ton individualité. Tu vas m’en apprendre quatre.

Et il me les a nommées.

– Bien sûr !

– Autre chose... Tu n’as pas une autre robe que celle-là ?

– J’ai une jupe noire qui est mieux que celle-ci et je suis en train de me faire une blouse.

– Est-ce qu’elle sera prête pour vendredi ?

– Oh, certainement !

– Bien, a dit Leplée. Tu répéteras ici demain à quatre heures. Comme je sortais, il m’a retenue :

– Comment t’appelles-tu ?

– Edith Gassion.

– Pas fameux ! Ce n’est pas un nom de théâtre... Il m’a regardé un long moment, puis il a dit :

– Tu es un vrai moineau de Paris, et le nom qui t’irait, ce serait Moineau. Malheureusement, ce nom est déjà pris ! Il faut chercher autre chose... Un moineau, le peuple l’appelle « piaf » ... Pourquoi ne serais-tu Edith Piaf ?

Il a réfléchi quelques secondes encore, puis il a repris :

– C’est décidé ! Tu seras Edith Piaf !

Ma sœur et moi, nous n’aimions pas tellement Piaf. On trouvait que ça ne faisait pas assez artiste.

Mais j’ai réfléchi et j’ai dit à ma sœur :

– Tu sais, Momone, Piaf, ça ne sonne pas si mal que ça. C’est gentil, un petit Piaf. Ça chante ! C’est gai, c’est le printemps, c’est nous, quoi.

D’après J. Pernard-Lue, 100 grandes figures françaises

VOICI CE QU’ON RACONTE

Une chanson serrée comme un poing. Edith Piaf...

Elle fit son ascension sur les planches des théâtres parisiens et devint très vite une étoile de première grandeur. Ses chansons, sa voix forte, émouvante et tragique enrichirent la chanson française de nouvelles intonations compréhensibles et proches pour tous ceux qui l’écoutaient. Ses thèmes préférés furent l’amour non partagé et la solitude. Mais ses chansons parlaient aussi d’un jeune garçon qui fonçait sur sa moto, du soldat qui retournait dans son pays, du destin de la femme. Et chaque fois c’était magnifique !

Et voici ce qu’on raconte.

Lorsqu’en 1965, les Parisiens accompagnèrent leur chanteuse bien aimée au cimetière du Père-Lachaise, tout le long du chemin un homme tenait au-dessus de sa tête un drapeau tricolore. Cet homme fut l’un des 120 internés d’un camp nazi qu’elle avait sauvés pendant la guerre.

Voici comment cela se passa. Edith Piaf obtint des Allemands l’autorisation de chanter devant des prisonniers de guerre français. Elle revint du camp avec une photo sur laquelle elle était prise avec les prisonniers. De retour à Paris, elle fit agrandir la photo et découpa chaque figure de la photographie d’ensemble. Il ne restait qu’à coller ces petites photos sur des passeports préparés. Ensuite, il fallait se débrouiller pour y apposer le cachet de la préfecture de Paris et les remplir aux noms des prisonniers.

Quelque temps après, Edith demanda l’autorisation de donner un autre concert dans le même camp et y apporta, dans une valise à double fond, cent vingt faux passeports.

Cent vingt prisonniers français furent sauvés. Si les autorités d’occupation avaient découvert les passeports, la chanteuse aurait été exécutée.

Il y a une chanson dans le répertoire d’Edith Piaf qui, par l’ambiance qu’elle crée, est très proche de cet épisode. Composée par Chauvigny sur les paroles de Bouquet, elle est intitulée « Je sais comment ».

D’après J. Pernard-Lue, 100 grandes figures françaises

RENÉ LAENNEC DÉCOUVRE L’AUSCULTATION

René Laennec est l’une des célébrités de la médecine française. Il a inventé le stéthoscope, appareil pour ausculter les malades.

C’était le début de l’automne, à l’approche du soir. Laennec entra dans la cour du Louvre au milieu de laquelle jouaient des enfants. Pour une fois, lui qui était toujours si pressé, marchait à petits pas.

Il était à bout de force. Quinze ans de lutte, d’un travail fatigant et tout cela pour arriver à quoi ?...

Certes, il avait bien fait quelques progrès, il avait tenté quelques expériences, mais tout cela était inutile aussi longtemps que l’on n’aurait pas un moyen quelconque permettant de savoir ce qui se passait à l’intérieur des poitrines malades.

Ainsi hier encore, cette vieille femme ... En vain avait-il collé son oreille à tous les endroits de sa poitrine : elle était trop grasse ce qui rendait impossible toute espèce d’audition.

Et tout ce qu’on peut faire, c’est d’attendre. Toujours attendre...

Depuis un moment, Laennec regardait distraitement le spectacle des gamins jouant au milieu de la cour. Ils avaient posé une longue poutre sur trois grosses pierres, comme pour faire une balançoire. Laennec s’approcha sans bien savoir pourquoi.

– Qu’est-ce que vous faites là ?

– C’est un jeu, m’sieur, on communique.

– Vous communiquez ?

– Oui, m’sieur. Regardez !

L’un des gamins alla s’installer à l’autre extrémité de la poutre. Celui qui était resté près de Laennec lui fit un signe :

– Vas-y, Thomas.

Il colla son oreille contre le bois. L’autre s’était penché aussi et grattait la poutre avec une épingle en fer.

– Et alors ? dit le médecin.

– Alors ? Rien, on entend...

– Ah...

Le docteur se préparait à partir. Brusquement, pour une raison qui lui était inconnue, il eut l’impression que quelque chose d’important était en train de se passer, là, devant lui, à ses pieds, au milieu de ces gosses parisiens.

Il se baissa, observa les gamins, la poutre.

– On entend ? répéta-t-il... Qu’est-ce qu’on entend ?

– Vous n’avez qu’à écouter, m’sieur.

Laennec, à son tour, colla son oreille contre la poutre.

– Vas-y, Thomas répéta le gamin.

Et alors, soudain, le visage du docteur se transforma. Il restait là, les yeux grands ouverts, écoutant le bruit très distinct, très clair, de l’épingle frottée contre le bois, à quatre mètres de lui.

– Alors, m’sieur, vous entendez ? demanda le gamin.

– Oui... j’entends… dit-il d’une voix sourde.

Une expression de joie passa sur son visage. Le grattement de l’épingle pénétrant dans sa tête devenait énorme. L’émotion était trop forte. Il se redressa, frémissant. Une minute, il resta là, immobile, comme un homme qui, soudain, a trop reçu et ne sait plus que faire des merveilleux présents. Les gamins le regardaient étonnés. La nuit descendait. Il partit à grands pas, se forçant à ne pas courir. Il devait vérifier ça.

Il était essoufflé lorsqu’il pénétra dans son cabinet, à l’hôpital. Il s’arrêta dans la pièce, jetant des regards autour de lui. Puis, il se précipita sur le bureau, saisit un cahier qui se trouvait là et essaya de le rouler sur lui-même. Il recommença plusieurs fois et, lorsqu’il eut obtenu un rouleau compact, il le lia avec une ficelle et sortit de la pièce.

La nuit était complètement tombée. Dans la grande salle, une infirmière allumait les lampes. Laennec marcha droit vers le lit d’une malade.

– Asseyez-vous, lui dit-il, n’ayez pas peur. Je ne vais pas vous faire de mal. Au contraire, ça va vous amuser.

C’était une vieille femme. Elle se redressa avec peine.

– Bon... Maintenant respirez fort.

Il avait collé l’une des extrémités du rouleau de papier contre son dos et, l’oreille appliquée à l’autre extrémité, écoutait attentivement. La malade jeta un coup d’œil par-dessus son épaule et sourit. On entendait des petits rires sur les lits voisins.

Mais Laennec n’y faisait pas attention.

– Maintenant, toussez.

Laennec se redressa lentement. Son visage rayonnait.

– J’entends, dit-il d’une voix tremblante en s’adressant à son collègue qui était entré dans la salle. J’entends...

La malade se retourna vers sa voisine:

– Ça ne guérit peut-être pas, mais on ne peut pas dire que ça fasse très mal... Les médecins marchaient côte à côte, ils se regardaient.

– C’est incroyable, n’est-ce pas ? dit Laennec. Un rouleau de papier ! Que c’est bête. Un simple rouleau de papier...

Ils sortirent de la salle. En marchant dans le couloir, Laennec s’animait :

– Toutes ces poitrines ont fini d’être muettes ? J’entends !

D’après J. Pernard-Lue, 100 grandes figures françaises

JACQUARD

Joseph-Marie Jacquard, célèbre mécanicien industriel, naquit à Lyon en 1752. Fils d’un ouvrier, il fut lui-même pendant longtemps tisseur d’étoffes, et c’est en voyant les fatigues de ses compagnons que lui vint l’idée de faciliter leur travail.

A cette époque la vie de tisseur était des plus pénibles. Le travail se faisait en famille, dans des taudis où le jour ne pénétrait qu’à peine. Bien heureux était l’artisan, qui, au bout d’une longue journée, avait tissé quelques centimètres, trois, quatre, cinq à peine.

Avant Jacquard les machines à tisser avaient des cordes et des pédales ce qui obligeait le tisseur de se faire aider par trois compagnons. Il chercha un moyen d’améliorer la machine. Dans le grenier, à côté de sa mansarde, il faisait des expériences. Toutes ses économies y passaient; ses dimanches aussi y passaient.

Enfin, en 1790, il inventa un mécanisme qui rendait le métier beaucoup plus simple, et en 1801, le premier modèle du métier « à la Jacquard » permit à un seul homme au lieu de quatre de suffire à une machine et de libérer les ouvriers de travaux pénibles.

Cette invention ne fut pas acceptée sans difficultés : les ouvriers ne comprenaient pas son importance et n’y voyaient qu’un moyen de supprimer du travail à de nombreux bras. Ils poursuivirent Jacquard, et l’ordre fut donné de détruire publiquement la machine.

Plus tard Jacquard reprit son invention et réussit à la faire adopter. Mais ce ne fut que vers 1812 que l’usage du métier « à la Jacquard » devint général à Lyon.

Même pendant les années les plus difficiles de sa vie, Jacquard n’avait pas voulu quitter sa patrie et avait refusé de nombreuses propositions de venir à l’étranger. Son patriotisme fut récompensé lorsqu’il vit toutes les grandes villes manufacturières de France reconnaître son métier et adopter son invention.

Toujours simple et modeste, il ne reçut en échange d’immenses services qu’il rendit aux ouvriers de Lyon, qu’une petite pension que lui fit sa ville natale. Il fut nommé chevalier de la Légion d’honneur en 1819 et passa la fin de sa vie à Oullins, près de Lyon, où il mourut le 7 août 1834.

Une statue lui a été élevée dans cette ville en 1840.

D’après E. Fоa, Les Petits savants